Illégitimes

Illégitime  Illégitimes          

   (2016)  Roumanie  Adrian Sitaru (1 h 29)

Avec Alina Grigore, Adrian Titieni, Robi Urs

 Synopsis : Lors d’un repas de famille, quatre frères et sœurs découvrent le passé polémique que leur père leur a caché. Tandis que cette révélation divise la famille, un autre scandale surgit…

Le cinéma Roumain a vu sa popularité grimper ces dernières années. Il a connu sa consécration avec la Palme d’Or 2007 : 4 mois, 3 semaines, 2 jours de Christian Mungui qui après son puissant Au delà des Collines a obtenu avec Baccalauréat le prix de la mise en scène cette année. Si l’on devait réfléchir à une constante chez les cinéastes contemporains, ce serait sans doute cette réflexion autour des traumas d’un pays, entremêlant destin individuel et interrogations politiques, un cinéma à la fois en prise sur la réalité et métaphorique, hanté par le passé. Le film de Christian Mungiu, évoquait l’histoire d’un avortement illégal sous la dictature de Ceausescu, et cet acte clandestin sous dictature est aussi le point de départ que choisit Adrian Sitaru, révélant combien les blessures sont encore ouvertes aujourd’hui. Le jeu des comparaisons s’arrête là car les horizons esthétiques et thématiques des deux compatriotes sont radicalement opposés. Christian Mungiu n’hésitait pas à imprégner son drame d’une intensité plus proche du thriller, là où le film d’Adrian Sitaru tient davantage de la chronique familiale tourmentée. Olivier Rossignot

Critiques:

La précieuse tension d’Illégitime possède une curieuse forme de circonflexe inversé, avec ces deux scènes explosives placées en tout début et fin de film, avec son ventre un peu mou où s’opère ce troc progressif de sujets tabous. A première vue, l’échange en question peut prêter à confusion, et susciter des doutes quant au point de vue du réalisateur. Dans un retournement d’une ironie très cruelle, les enfants de cette famille (dont on ne pouvait qu’approuver la rébellion envers un père criminel) se retrouvent à leur tour en position d’être moralement condamnés. Dès lors, qui a raison et qui a tort? Qui sont les salauds? Cette punition des enfants ingrats pourrait faire passer le film pour complètement réac, mais ce serait nier à Sitaru sa malice, sa capacité à avoir un tour d’avance.  Gregory Coutaut

Qui suit avec un peu d’assiduité le déferlement soutenu de films d’auteur roumains depuis une dizaine d’années ne peut qu’être transi par un sentiment de déjà-vu face aux premières minutes d’Illégitime d’Adrian Sitaru – découvert en 2009 avec Picnic. La façon de cadrer habitacles de voiture et appartements de famille, le choix des situations (ou les apparences qu’elles se donnent), l’un ou l’autre visage déjà croisé à plusieurs reprises, la matière d’une quotidienneté médiocre galvanisée par la mise sous tension d’un rapport moral, la liquidation sans fin des débris culturels de l’ère communiste.   Julien Gester

Tous ces éléments qui se dévoilent au fur et à mesure que le film avance semblent nous approcher inexorablement d’une potentielle tragédie grecque ! Mais Illégitime ne prendra pas forcément les chemins les plus évidents, ni les plus balisés… Les personnages se battent contre leurs passions, leurs désirs, leurs représentations aussi… Les situations sont parfois excessives mais elles se dévoilent tout en finesse. Les lourds secrets surgissent les uns après les autres. C’est douloureux, c’est difficile et ça travaille jusqu’à l’explosion. Mais le résultat est finalement très touchant, et loin de tout manichéisme primaire. Les acteurs sont terriblement convaincants et l’ensemble parvient à construire un lien fort entre deux générations que tout semblait opposer.
« Pour moi, c’est un film sur la moralité et les choix, mais aussi sur le temps et comment cet élément peut tout changer, jusqu’à la perception des notions morales. » Adrian Sitaru Utopia

Revigoré par une énergie qui pourrait bien être celle du désespoir, par une urgence aussi, Sitaru tire son récit vers la fable (a)morale, voire même vers l’allégorie, parvenant à communiquer une réflexion aiguë sur son pays par le prisme de l’intime; et de mémoire cinéphile, on n’avait pas vu ça depuis Quatre mois, trois semaines et deux jours, de Cristian Mungiu. Comme si ça ne suffisait pas, sachez que le personnage du père atrabilaire dans Illégitime est incarné par le comédien Adrian Titieni, qui incarne vaillamment le premier rôle dans Baccalauréat… de Cristian Mungiu. Tout ça pour dire que Illégitime est un film passionnant et qu’il révèle, en prime, un acteur formidable qui joue les pères de façon hors pair.    Cineeuropa

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